Art & Culture Monaco

Dominique Milardi, Les bons conseils du sommelier

Actif président des sommeliers de Monaco et maître d’hôtel au Méridien Beach Plaza, Dominique Milardi nous parle de ses coups de cœur et des bons accords pour les repas de fêtes.

- Pourriez-vous nous parler du champagne, vin de fête par excellence ?
La Champagne se porte bien, même si beaucoup de marques se disputent le marché aujourd’hui avec moins de production. Je suis pour ma part toujours séduit par la maison Roederer, et pas seulement par la cuvée prestige "Cristal", très rare, mais on peut se faire plaisir avec la cuvée "243", pleine de finesse et de rondeur. La cuvée "Comte de Champagne" de Taittinger est aussi un excellent choix. Ces vins sont évidemment onéreux mais on peut aussi aller vers un champagne de vigneron, comme Eric Legrand, qui propose des cuvées entre 18 et 30€, comme "Bulle de Folie" sa cuvée haut de gamme, ou alors "Bulle de Nature" en pinot blanc 100 % ; c’est la cuvée de son fils Valentin. On peut aussi citer Philipponnat qui fête son 500e anniversaire avec la cuvée "1522" !

- Rayon "vins tranquilles*", quels sont vos coups de cœur du moment ?
Je pense bien sûr à la région de Bordeaux avec Malartic Lagravière en Pessac-Léognan, un vin que je tiens à mettre à l’honneur sur les millésimes 2009/2010 en rouge, si on peut les avoir parce que ça devient difficile. En Bourgogne, je conseille sans hésiter le chablis du domaine Garnier ou, dans les vins de Loire, les sauvignon de Bougrier ou les sancerre de Pascal Jolivet. Pour qui aime les rouges charnus, je conseille le Clos de l’Oratoire en Chateauneuf-du-Pape ou encore Françoise Paillard, qui élabore des cuvées en musique...

Et dans les vins régionaux ?
J’ai un gros coup de cœur pour le Clos Saint Vincent de Gio Sergi à Bellet dont le vin était sur la table du mariage du Prince Albert et de la Princesse Charlène en 2011. En Provence, j’ai découvert récemment l’excellent "Clos de Caille" à Entrecasteaux, exploité par la famille Mariotti, des Monégasques. On n’oublie pas non plus Vignelaure ou le château de Beaupré en Coteaux d’Aix. Et comme nous sommes le pays du rosé, pourquoi ne pas le substituer aux blancs sur les fruits de mer ? Cela fonctionne très bien...

- La concurrence des vins du monde est-elle forte ?
Bien sûr, il y a de très bons vins partout. Par exemple, pour accompagner la cuisine de notre chef espagnol Sergi Arola, je conseille des vins du Priorat Monsant d’Alvaro Palacios ou du Clos Mogador de René Barbier près de Barcelone. On peut aussi aller sur l’Argentine et des vins de Mendoza au rapport qualité-prix intéressant. Et s’il y a une région dans le monde que j’adore, c’est la Géorgie, avec des saperavi merveilleux. Et on garde le tokay de Hongrie pour la fin du repas, après le dessert… Et pourquoi pas un Rossese de Dolceacqua supérieur, tout à côté de chez nous. Je recommande aussi le saké japonais, un "vin" de riz très délicat, qu’il faut découvrir sur du saumon par exemple. On peut aussi à s’amuser à faire des "bi-accords" sur un plat avec deux vins où chacun donne son avis. Un petit coup de cœur aussi pour les vins ukrainiens de la maison Shabo qui produit d’excellents cabernets.

- Que boire avec le foie gras ?
Là il faut faire attention car un vin trop sucré peut mettre en péril la suite du repas. Plutôt qu’un gewurstraminer ou un muscat, je recommande un sancerre mégalithe, voire un vin de glace allemand ou un formidable cidre de glace canadien.

- Que conseillez-vous avec le chapon ?
Le vin rouge va bien, c’est sûr, mais on peut aussi mettre un vin blanc assez structuré comme un Chablis antérieur à 2010.

- Grande question pour le fromage : rouge ou blanc ?
Il ne faut pas hésiter : la plupart des fromages sont à déguster avec un vin blanc . Et surtout les chèvres ! J’adore quand on fait légèrement chauffer ce fromage au four et qu’on le sert par exemple dans une petite coque de pâte sablée avec un Pessac Léognan blanc. Sur une pâte persillée, je préconise un Porto rubis qu’il faudra ensuite conserver sur un dessert au chocolat. Sur les pâtes cuites comme le Comté ou le Beaufort, allons sur un blanc du Jura ou de Savoie : on se trompe rarement lorsqu’on associe les produits d’une même région…
Et comme une succession de vins ou d’alcool peut devenir vite un peu lourde, je conseille de servir un verre d’eau avec chaque verre d’alcool. Et, sauf pour les enfants bien sûr, on évite aussi les cocktails à base de jus de fruits qui apportent encore du sucre.

- Peut-on oser les alcools forts sur un plat ?
Pourquoi pas ! Un rhum du Pérou ira parfaitement sur une caille farcie aux raisins, un whisky ou pourquoi pas un gin sur un saumon fumé. Mais un seul par repas, il ne faut pas les mélanger et les servir frais mais sans glaçons.

- Vos conseils pour la température de service ?
C’est très important. On boit toujours trop chauds les vins rouges "à température ambiante", mais si la pièce est à 24°, c’est trop. Le rouge doit être sorti à 14 ou 15° et on le laisse alors tranquillement monter en température. Pour le blanc, surtout pas de glaçons et une température autour de 11°. On peut utiliser un seau à glace mais je préfère pour ma part les étuis isothermes.

- Et l’erreur à ne pas commettre ?
C’est bien sûr de démarrer avec des produits très puissants pour passer ensuite à des produits plus légers. Il faut aller crescendo. Sur le chocolat, on peut rester au vin rouge, ou alors, Porto et Banyuls. Sur un poisson, on peut accorder un blanc bien sur, mais aussi un rouge assez léger s’il est cuisiné à la Bordelaise. Même chose pour les coquillages : un sancerre rouge peut très bien accompagner des huîtres.