Art & Culture Alpes Maritimes

Pierre Palmade

Incarnant un fils meurtri à l'idée que sa mère ne semble pas s'intéresser à l'homme qu'il est devenu, il va, connaissant l'amour qu'elle lui porte, se permettre d'aller très - voire trop - loin avec elle...

> Le lien connaît un joli succès...
Pierre Palmade : Je crois que la rencontre entre Catherine Hiegel - qui vient d'un théâtre classique - et moi - qui suis issu d'un théâtre très populaire - a piqué la curiosité des spectateurs ! Nombreux sont ceux qui se sont demandés ce qu'un tel mélange pouvait bien donner sur scène mais qui, en ressortant de la salle, ont finalement trouvé évident qu'elle soit ma mère et que je sois son fils, et ce dans un registre moins comique que d'habitude...

> Le rire comme un devoir...
Je me suis en effet affranchi, grâce à cette pièce, de cette obligation que je m'étais moi-même imposé d'être drôle toutes les vingt secondes ! N'étant plus obsédé par l'effet comique, je découvre le plaisir de prendre le temps de construire un personnage avec ses névroses, sa gravité, ses colères, j'apprivoise un jeu moins "horloger" et plus naturel...

> Mais ça rit quand même...
Bizarrement, ces deux personnages ont la colère comique ! (rires) Par contre, ce qui est curieux, c'est qu'en ne recherchant pas le rire à tout prix, il surgit à des moments où l'on ne l'attend pas et quand ça arrive, je dois lutter contre ma nature première pour ne pas le "fixer" et chercher à le reproduire le lendemain ! Catherine est contre ce mécanisme de jeu presque mathématique et c'est elle qui me pousse à être toujours plus sincère, vrai et dans l'instant... Aujourd'hui - ça me choque presque (rires) -, je prends du plaisir sur scène sans chercher à être drôle au point que l'auteur en moi se dit qu'il est peut-être capable d'écrire différemment, d'une manière peut-être plus grave et plus sanglante... Le lien m'a ouvert un horizon qui m'a énormément troublé...

> Vous explorez sans cesse la famille...
La famille est réellement mon terrain de jeu, que ce soit celle d'où l'on vient ou celle que l'on crée... Je ne suis pas très citoyen, social et politique mais très axé sur l'affectif et sur "le lien" d'ailleurs...

> Écrire une autobiographie sans se cacher derrière des personnages...
Écrire Dites à mon père que je suis célèbre a été un soulagement et un véritable plaisir grâce à la bienveillance d'Eric Libiot - le rédacteur en chef culture de L'Express - qui y a collaboré... Ça a été un grand et doux moment qui a précédé celui, beaucoup plus éprouvant, de la promo... Se mettre à nu seul devant sa feuille est une chose, mais en parler à des gens qui parfois ne nous voit que comme de la chair à canon en est une autre ! (rires) Dans tous les cas, je ne regrette pas car, thérapeutiquement parlant, ça m'a beaucoup aidé à tourner la page en dévoilant qui j'ai été ou plutôt qui je crois avoir été pendant trente ans... C'est un exercice enrichissant qui m'a aussi permis de livrer mes vérités, mes lumières et mes ombres sans qu'elles ne soient déformées par le spectre d'une certaine presse...

> Se livrer est aussi le sujet de la pièce Le Lien...
Mon personnage est un auteur que sa mère ne lit pas... Il lui reproche et c'est d'ailleurs la source du clash qui conduira peut-être cette mère et ce fils à se séparer ! Elle n'a lu aucun de ses dix ouvrages car elle a peur de ne pas les comprendre et parce qu'elle souhaite que son petit reste son petit ! Je connais bien ça avec ma mère ! (rires) C'est adorable mais c'est parfois étouffant de ne pas se sentir un adulte de 50 ans à ses côtés ! ■

© Propos recueillis par Morgane Las Dit Peisson


Pierre Palmade dans "Le lien" // Festival de Ramatuelle / 07 août // Grasse / 28 mars 2020 // Antibes / 04 > 05 avril 2020 // interview complète sur www.le-mensuel.com