Art & Culture Alpes Maritimes

Pierre-François Martin-Laval

Désireux, pour son sixième long-métrage derière la caméra, de s'éloigner des chemins déjà parcourus, c'est sur l'histoire vraie de Fahim que s'est jeté son dévolu. Retraçant avec bienveillance, respect et humanité l'intégration en France d'un enfant bengalais qui connaîtra un destin extraordinaire.

> Accompagner son film en régions pendant les avant-premières...
J'ai envie de dire que c'est presque vital de rencontrer le public après tant d'anneés de travail, c'est pour ça que j'essaie toujours d'organiser des tournées avant la sortie d'un film. Je viens du café-théâtre, alors je crois que le contact avec le public fait vraiment partie de mon ADN...

> Raconter une histoire vraie...
Je me suis appuyé sur une très belle histoire recueillie dans le livre Un roi clandestin mais adapter un ouvrage présente évidemment d'autres difficultés, comme le fait de devoir raconter plus de trois ans d'une vie de SDF sans-papiers en 1h45 sans ne jamais trahir les personnes qui l'ont vécu... C'était primordial pour moi que Fahim, se reconnaisse dans le récit et les dialogues. D'ailleurs, c'est un jeune homme très franc qui n'a pas hésité à me dire immédiatement tout ce qui ne lui allait pas ! (rires) Certaines choses étaient à ses yeux trop éloignées de la vérité et d'autres au contraire beaucoup trop proches alors - après négociations bien sûr (rires) - j'ai retouché ce qui le mettait mal à l'aise...

> Un film qui a exigé une certaine investigation...
Je suis allé très loin dans les émotions mais le sujet était tellement grave et sérieux que je ne pouvais vraiment pas me permettre de raconter n'importe quoi. Je me suis beaucoup renseigné auprès de l'OFPRA, de la préfecture, de France Terre d'Asile ou même des flics car il y a des sujets où l'on n'a pas le droit de se tromper.

> La découverte de l'histoire de Fahim ?
Je suis tombé dessus deux ans après les faits, en février 2014, grâce à l'émission On n'est pas couché et au directeur de la photo de tous mes films qui, en voyant Fahim raconter son parcours, m'a immédiatement appelé pour que j'allume la télé. Il savait que j'avais envie de m'essayer à un autre registre et il m'a très bien cerné car dès le lundi j'achetais le livre...

> Cette découverte a donné lieu à un film difficilement "classable", qui oscille entre drame et comédie...
Je crois que moi aussi je serais incapable de choisir dans quel registre Fahim s'inscrirait le mieux mais ce dont je suis certain, c'est qu'en tant que citoyen, sa vie est un drame... Un enfant qu'on sépare tout petit de sa maman et qui la retrouve plusieurs années plus tard, ça restera un drame même si son destin a été, par la suite, incroyable ! Mais dans la mise en scène, j'ai tout fait pour qu'il y ait de l'espoir et que l'on s'attarde un peu sur le bon côté des choses...

> Le personnage incarné par Gérard Depardieu...
Dès la lecture du livre, j'ai trouvé le "personnage" du professeur d'échecs génial ! Ça s'est confirmé en rencontrant le véritable entraîneur de Fahim... Une sorte d'ogre barbu aux yeux clairs, à l'air aussi gentil qu'autoritaire, qui faisait des blagues à ses élèves tout en se faisant respecter... Face à lui, j'ai eu le déclic, seul Depardieu pouvait faire le poids tant au sens propre qu'au figuré ! Il avait l'envergure du personnage, les traits de caractère et cette capacité à provoquer autant d'orages que de bonheurs... C'est un génie, un cas à part...


Film en salles à partir du 16 octobre 2019 - interview vidéo sur le-mensuel.com - © Propos recueillis par Morgane Las Dit Peisson au CGR de Draguignan