Art & Culture Alpes Maritimes

David Voinson "Notre génération ressent une anxiété assez constante..."

Bien qu’il n’ait qu’un petit quart de siècle au compteur et qu’il n’en soit qu’à son tout premier spectacle, David Voinson étonne par son professionnalisme et sa maturité. Séduisant, malgré lui, tant ceux de son âge que leurs aînés, le jeune humoriste réussit ce tour de force de parler de lui, de ses expériences, de sa génération et des préoccupations de celle-ci avec une telle aisance et une telle sincérité que tout le monde finit par s’y reconnaître ou s’y intéresser ! Pour preuve, les salles où il se produit ne cessent d’afficher complet les unes après les autres ! Passionné par la comédie et inspiré en permanence, il a même déjà donné naissance à sa propre série - En terrasse - disponible chez Prime Video...

- En pleine tournée avec ton 1er spectacle…
David Voinson : Je suis heureux car la tournée se passe incroyablement bien. J’ai de la chance d’avoir une vraie bonne équipe à mes côtés et j’ai encore du mal à réaliser que les gens présents dans la salle ont acheté des billets pour me voir "moi" ! J’ai commencé vers 15 ans à participer à des comedy clubs et ce n’est qu’après avoir commencé à faire des vidéos sur les réseaux qu’il y a eu un véritable engouement. Voir s’afficher "complet", c’est beau, touchant, intimidant et boostant à la fois !

- On a eu peur que les réseaux sociaux éloignent le public des salles mais tu es la preuve qu’ils peuvent contribuer à les remplir…
Totalement ! Le web peut permettre de découvrir énormément d’artistes et d’humoristes car je ne pense pas qu’il y ait encore un schéma à suivre... Il n’y a pas si longtemps, il fallait participer à un maximum de comedy clubs pour faire marcher le bouche-à-oreille et essayer de se faire repérer par des producteurs. Aujourd’hui ça peut arriver via Internet comme ça peut se produire "à l’ancienne", sur scène et sans vidéo. Je pense notamment à Paul Mirabel, un artiste incroyable que l’on a connu grâce à Montreux. Ce n’est qu’ensuite qu’il est apparu sur les réseaux.
De mon côté, j’ai vraiment une passion pour la vidéo et pour la scène depuis que je suis tout petit. Je ne me verrais pas faire l’un sans l’autre donc je ne me suis pas forcé à aller vers ce format-là. Mais voir que grâce aux vidéos les gens me suivent et que ça les amène à voir le spectacle, ça me comble ! Pour la plupart, c’est en effet leur première fois dans une salle alors ça me fait plaisir de partager ça avec eux et qu’on se construise un véritable lien. Sur les réseaux, ils me voient pendant 1m30, sur scène c’est 1h10 et surtout, je peux les voir à mon tour et leur parler directement. Ce n’est pas du tout la même ambiance et c’est pour ça que je tiens à faire des propositions totalement différentes. Même si on retrouve évidemment l’essence de mes vidéos dans le spectacle, il est hors de question de faire payer le public pour un contenu qui ne serait pas exclusif, j’y fais très attention.
Je parle énormément des relations garçons-filles dedans, du côté “charo”, c’est-à-dire, pour le public plus âgé, "goujat" et "Don Juan" ! (rires) Et évidemment, il y a la touche féminine qui occupe une place importante dans ce show.

- La comédie a toujours été une évidence, dès l’enfance ?
Oui, il n’y a jamais eu de plan B. Je l’ai réalisé en en parlant avec des amis. Quand ils m’ont demandé ce que j’aurais fait si ça n’avait pas marché, je n’ai pas su quoi répondre car pour moi, c’était une évidence que je fasse ce métier. Rien d’autre ne m’a jamais attiré. Gosse, j’avais déjà tout construit dans ma tête : un 1er sketch, une 2nde scène, un concours et une montée à Paris… J’ai avancé avec ce but sans me dire qu’il fallait prévoir une sécurité. J’espère évidemment que ça va durer. Ça fait 10 ans que je monte sur scène et maintenant, j’ai vraiment des choses à raconter bien que je n’aie que 25 ans ! Les jeunes aussi peuvent avoir du vécu ! (rires)

- Du vécu et une part de féminité complètement assumée…
Jouer l’homme et la femme dans mes vidéos est vraiment le résultat d’une envie de parler des relations amoureuses, qui est un sujet qui nous tient à cœur dans ma génération ! (rires) C’est à nos âges qu’on se pose généralement pas mal de questions, donc aborder ce thème m’a beaucoup appris sur moi, sur ce que j’avais envie d’être et de faire dans la vie. Ça me plaît bien d’endosser un personnage de fille. Même s’il peut parfois apparaître un peu caricatural, je le fais avec la plus grande bienveillance. Tout ce qu’elle dit, même dans ses excès de voix et de caractère, c’est intéressant, pertinent et posé.

- Bosseur et autodidacte…
J’apprends tout sur le tas et je travaille sans cesse. J’ai lancé ma série - En terrasse - sur Amazon Prime et très honnêtement, j’ai réellement découvert le travail de comédien sur le tournage. Mon parcours prouve que même si on n’a pas beaucoup d’argent, ou de temps pour suivre des cours, ou d’envie de partir sur une formation trop scolaire, on peut réussir à la condition de travailler avec motivation, énergie et passion.

- Une crise de la vingtaine ?
Un peu ! (rires) Sérieusement, les trois quarts des jeunes de 20 à 25 ans se posent énormément de questions sur leur avenir et j’ai l’impression que c’est un peu pris à la légère parce que c’est un phénomène plus récent que celles de la trentaine et des décennies suivantes. La jeunesse est dans l’esprit de beaucoup une période heureuse où tout est encore possible alors qu’énormément de gens de notre génération ressentent une anxiété assez constante... Les réseaux sociaux nous font complexer parce qu’on se compare à la vie de jeunes influenceurs qui gagnent une fortune. Quand on est étudiant, qu’on bosse sérieusement et qu’on n’arrive pas à manger à la fin du mois, on a l’impression d’être un looser. Je pense qu’il faut donner de l’espoir à chacun et s’encourager les uns les autres.

- Ton humour n’est pas réservé à une tranche de la population…
J’aime cette idée que mes vidéos et mon spectacle plaisent à un panel plus large que les gens de ma génération. Ce dont je parle est un peu autobiographique donc je n’ai pas cherché à ce que les gens se reconnaissent. J’ai seulement essayé d’être le plus sincère et le plus honnête possible dans ma démarche.
Évidemment, j’aime l’idée de plaire à un maximum de gens et j’adorerais être un artiste populaire. En revanche, je pense qu’il ne faut jamais rien faire pour tenter de plaire à tout prix à tout le monde car c’est le meilleur moyen de se perdre…