Art & Culture Monaco

Antoine Bahri, Le digital au service de Monaco

Concepteur de l’application de cashback "Carlo", l’entrepreneur Antoine Bahri place le digital au service de l’économie locale. Convaincu par la force du numérique, il est également co-fondateur de l’école de développeur web, La Capsule Monaco.

- Comment est née votre envie d’entreprendre dans le digital ?
Après avoir passé deux ans au sein de notre boutique familiale - l’enseigne d’horlogerie Bahri Monaco - j’ai décidé de partir m’installer à Barcelone afin d’y obtenir un MBA. Là-bas, je me suis associé avec trois camarades de promo et l’on a imaginé LISTO, un moyen de paiement dédié au monde de la restauration. Cette application inédite permettait aux utilisateurs de suivre le montant de leurs consommations en temps réel, de payer en un clic ou encore de partager l’addition entre amis. C’était une super expérience, on a pu rencontrer de nombreux investisseurs. Mais à la fin du MBA, pour différentes raisons, on a tous choisi de ne pas continuer l’aventure. Si cette expérience m’a énormément appris, j’ai préféré revenir à Monaco pour y développer de nouveaux projets.

- C’est là que vous avez imaginé Carlo…
Oui, c’est en associant ma connaissance des commerces de Monaco et mon expérience avec LISTO qu’est née l’idée de Carlo. J’étais conscient des besoins et des challenges que les commerçants monégasques doivent surmonter. Dès le départ, nous voulions contribuer à l’économie locale et offrir un système de fidélisation innovant. Depuis déjà plusieurs années, les grandes enseignes de vente en ligne se sont lancées dans une course à la réduction et les commerces de proximité ne peuvent pas rivaliser avec les tarifs affichés. Il fallait donc jouer sur un autre terrain. C’est là qu’est apparue l’idée de cashback.

- Quelles ont été les étapes de mise en place de votre application ?
J’ai commencé par solliciter les commerçants que je connaissais bien comme Crisoni, Maison Noir… Et l’on a lancé le projet avec trois boutiques en 2019. Encore une fois, l’idée de départ était de récompenser les acheteurs qui consomment en local. Lors de chaque achat, 5% du montant dépensé sont crédités dans leur portefeuille virtuel, et cet argent ne peut être dépensé qu’à Monaco. En quelques mois, d’une transaction par jour, on est passé à une cinquantaine… On a également mis en place un système de parrainage. Dans ce cas, l’utilisateur reçoit 2% en cashback, lors de chacun des achats effectués à Monaco par la personne parrainée. Du côté des commerçants, 10% sont facturés par Carlo. Après une étude de marché, on s’est rendu compte que les enseignes proposaient déjà ce pourcentage de remise à leur clientèle fidèle. C’est donc un montant qu’ils avaient l’habitude de déduire, sauf qu’avec Carlo, ce montant sera forcément réinvesti dans l’économie locale.

- De quelle manière le Gouvernement Princier a-t-il soutenu votre projet ?
Durant le confinement, au printemps 2020, on a réfléchi à la mise en place de solutions innovantes permettant de soutenir les commerces locaux. On a alors imaginé un site où l’on mettait en vente des bons cadeaux. De cette manière, les utilisateurs payaient ce qu’ils allaient consommer plus tard. Le gouvernement princier a apprécié l’idée et il a décidé de bonifier chaque bon de 10%. Si vous achetiez un bon de 100 euros, vous aviez 110 euros à dépenser à Monaco. Les commerces étaient ravis et l’opération a été un véritable succès.
C’est ensuite en été 2020 que nous avons été sollicités par le Centre Hospitalier Princesse Grace (CHPG) qui souhaitait offrir des bons cadeaux aux étudiants infirmiers. Mais sans valoriser un commerce plutôt qu’un autre. Ils voulaient que l’on puisse l’utiliser partout. On a donc créé des bons digitaux Carlo pour 70 étudiants en créditant leur portefeuille virtuel. Et une fois de plus, les commerçants étaient très contents. Ils ont reçu des clients qu’ils ne connaissaient pas, originaires de Nice ou d’autres villes azuréennes. Enfin, sur le même principe, le gouvernement a souhaité remercier les fonctionnaires de l’État. On a donc conçu ces bons Carlo à grande échelle, avec quelques développements. Certains ne souhaitaient pas utiliser leur smartphone, on a donc réalisé des bons papiers, munis d’un QR code. Ce qui a permis une importante accélération de notre croissance. De nombreuses boutiques ont décidé de s’inscrire et pour les aider à le faire, le gouvernement a offert les frais d’inscription à l’application, à partir du 1er décembre. Cette opération devait durer jusqu’en mars 2021, mais elle a été reconduite plusieurs fois et elle est toujours proposée à ce jour.

- Avez-vous des projets de développement ?
Aujourd’hui, nous avons 300 commerces inscrits, plus de 19 500 utilisateurs et 11 000 000 d’euros ont été dépensés localement grâce à Carlo. On sait également que de nombreuses personnes utilisent l’application au quotidien. En parallèle au cashback, Carlo permet de payer ses consommations dans les bars et restaurants, de partager une addition, de créer une cagnotte cadeau… Aujourd’hui, nous avons l’ambition de dupliquer ce modèle à d’autres pays. On est en train de monter un projet en Espagne. Notre objectif, en 2022, est d’être présent à travers 5 villes européennes.

- Comment êtes-vous devenu co-fondateur de La Capsule Monaco ?
Au fil du développement de Carlo, j’ai plusieurs fois senti le besoin de mieux connaître les modalités de création et de développement d’une application. J'avais besoin de mieux comprendre le travail quotidien d'un développeur. J’ai donc décidé de me former et c’est là que j’ai découvert La Capsule qui est l’une des meilleures écoles de coding en Europe. Après 10 semaines intensives, tout avait changé. En 2 mois vous êtes capables de créer une application de A à Z. Vous avez les compétences d’un développeur full-stack. J’avais l’impression de pouvoir réaliser n’importe quelle idée. J’ai adoré cette formation et je me suis dit qu’il fallait absolument importer ce concept à Monaco. Avec deux associés, Nicolas Frigot et Andréa Giuglaris, nous avons donc ouvert la première école de développeur web monégasque, hébergée dans les locaux d’IBC à Fontvieille. La Capsule Monaco s’adresse à la fois à des gens qui souhaitent se reconvertir, à des salariés qui travaillent sur des projets digitaux ou encore à des entrepreneurs qui veulent lancer leur application