Art & Culture Monaco

Alexis Giannotti, Réinventer une mode durable

Fondateur de la marque de prêt-à-porter monégasque Giannotti, Alexis est un véritable précurseur qui se donne les moyens de ses ambitions. Son but ? Composer un dressing d’intemporels durables, au style minimaliste et terriblement efficace, tous garantis sans fibre plastique.

- Comment est né votre engagement pour une mode plus responsable ?
Avant de fonder Giannotti en 2022, j’étais propriétaire d’une marque de streetwear. Je viens de cet univers du sport, du surf, de l’outdoor… Un monde dans lequel la mode abuse des fibres synthétiques. Le jour où j’ai réalisé la catastrophe écologique que cela représente, j’ai eu un véritable déclic. Quand vous lavez ces vêtements en machine, ce sont des millions de microparticules de plastique qui finissent dans les mers et les océans. Durant des années, j’avais participé à cette véritable tragédie. Il fallait donc que je recommence tout, que je reparte d’une page blanche pour repenser les choses de manière durable et responsable.

- Quelles ont été les premières étapes de création de la maison Giannotti ?
Pour concevoir des vêtements responsables, j’ai tout d’abord réfléchi à la méthode de fabrication. Et je me suis rendu compte que la maille, le "knitwear" est l’une des techniques les plus anciennes et qu’elle concentre de nombreux avantages dont le fait de rendre les vêtements plus "souples", ce qui permet de ne pas ajouter de fibres synthétiques comme le Lycra. Partant de ce constat, j’ai étendu mes recherches et découvert des usines de tissage à partir d’imprimantes 3D. De quoi réaliser des articles de mode en une seule pièce, et donc à partir d’un seul fil continu. Il n’y a plus de points de tension, ce qui prolonge la durée de vie du vêtement.

- L’autre secret de vos collections, ce sont ses fibres naturelles ?
Oui, il y en a trois. Nous avons une laine de mérinos qui provient de Nouvelle-Zélande, malheureusement très loin de Monaco, mais c’est une laine de très grande qualité, à la fois sur le plan éthique, en termes techniques (longueur des fibres), ainsi qu’au niveau de sa teinture, réalisée en Italie suivant des procédés non nuisibles pour les êtres vivants ainsi que pour les sols, l’eau, et donc la planète. Sur le long terme, malgré l’empreinte carbone de la livraison, c’est beaucoup plus responsable que les fibres plastiques. Nous avons ensuite du cachemire recyclé, qui est associé à du cachemire pur. Un équilibre est nécessaire pour éviter que le fil ne casse au tissage. Et notre troisième fibre est très particulière puisqu’elle est réalisée à partir d’un procédé unique. Elle se compose de laine de mérinos et d’une matière inédite, issue du recyclage du marc de café italien. Le résultat obtenu est super doux et permet d’économiser 30 % d’eau et de garantir une excellente thermorégulation de la chaleur corporelle. Le seul inconvénient est qu’il ne peut pas être teinté. Il reste gris, mais c’est un très beau gris ! (rires). Nous sommes les seuls au monde à utiliser ce procédé dans le secteur de la mode.

- Pourriez-vous nous parler de votre packaging compostable ?
L’idée est d’être le plus écoresponsable possible, de la conception des vêtements jusqu’à leur mise en vente. Nos sacs en papier sont fabriqués à partir de matières issues de forêts gérées de manière responsable, et mélangées à des produits recyclés de l’industrie du papier. Aucune forêt indigène n’a été abattue pour fabriquer ces sacs, et ils sont 100% biodégradables. Nos boîtes sont réalisées à partir de grains de café jetés, et remplacent 15 % de la cellulose des arbres. Enfin, nos commandes sont expédiées dans des enveloppes biodégradables/compostables, fabriquées à partir d’amidon de maïs, un mélange de bioressources naturelles et renouvelables. Je les ai moi-même testées en les enterrant dans mon jardin, et effectivement, après deux ans, tout se dégrade et certaines ont déjà entièrement disparu.

- Pourriez-vous décrire le style de Giannotti Monaco ?
Notre collection se compose d’essentiels, presque minimalistes. C’est un style simple et intemporel. Notre but n’est pas de concevoir des vêtements pour les soirées mais plutôt pour la vie de tous les jours. On couvre tous les basiques : des t-shirts, en passant par les pantalons, les joggings ou encore les bonnets. Si l’on veut faire évoluer le secteur de la mode, nous pensons qu’il faut proposer des pièces qui durent dans le temps. Giannotti, ce sont les bases d’un dressing, avec des coloris doux : du beige, du blanc, du gris, du bleu… Et notre couleur iconique, le bleu Betty, imaginé en mémoire à ma grand-mère, un bleu proche du bleu Klein. Et nous avons parfois des couleurs plus fun, mais qui restent en éditions limitées. Enfin, la boutique est à l’image de la marque : minimaliste et composée de matériaux naturels comme le bois, le marbre… On est très loin du luxe ostentatoire.

- Quels sont vos projets ?
Depuis un an, nous travaillons sur la production d’une nouvelle fibre, réalisée à partir de déchets de la filière du riz. Une matière 100% naturelle que je souhaite lancer l’été prochain et qui rappelle à la fois la soie et le coton. Mon autre défi est de concevoir des leggings, toujours sans aucune fibre synthétique. Ce qui est un incroyable challenge car il faut toujours ajouter des matières "stretch" et donc issues du plastique. Après de nombreuses recherches, nous avons découvert le premier fil stretch au monde entièrement biodégradable. On va le tester et peut-être que prochainement nous pourrons ainsi compléter notre gamme d’essentiels. Quand on s’éloigne du synthétique, c’est un véritable parcours du combattant, mais ça vaut le coup. C’est notre avenir qui est en jeu.


www.giannottimonaco.com